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28 septembre 2007 5 28 /09 /septembre /2007 11:18

Anté-scriptum :
Pour cette partie de mon passé, je suis obligé de modifier et condenser certains énènements. Il n'y a doncpas lieu de croire exactement ce que j'écris, c'est simplement une écriture qui permet de mieux expliquer mon histoire.

  Le gosse traverse le boulevard en filant ventre à terre à 200 mètres devant notre patrouille, agrippant de trouille son fusil d'assaut Kalashnikov. Il est sorti d'un groupe d'immeubles en ruines pour en rejoindre un autre tou aussi dévasté. Deux coups de feu éclatent et aussitôt, 2 petits nuages de poussière jaillissent près de lui. Un troisième coup claque, un petit nuage explose encore plus près de lui. Il finit quand même sa course pour se planquer quand j'entend le double bruit d'un RPG : un long chuuintement "Pccchhh..." suivi du "BANG" de la roquette qui explose.

  - Qu'est-ce qui se passe ? Une attaque ? me demande mon nouveau ninôme qui cale déjà son fusil d'assaut à l'épaule, visant la direction du bruit.
  - Pas encore, dis-je en remettant mes jumelles dans leur étui. Ils ont envoyé un "lapin", souvent un gosse parce qu'ils courent vite pour servir de cible à un sniper. Il a tiré trois fois et ça a suffi pour qu'il soit repéré, ausitôt ils ont tiré dans sa direction avec un lance-roquettes pour se le faire. Et voilà. Maintenant, ils vont peut-être essayer une offensive pour récupérer l'immeuble du sniper.
  - Ah ouais, pas con...
  - Non, pas con d'envoyer un gamin à la place d'un adulte, ils courent plus vite ! Je ne sais même pas s'il voit que je suis ironique. Ce type est arrivé depuis une semaine à Beyrouth et le souffle brulant de la guerre perturbe déjà ses repères d'homme civilisé, le vernis mince de la civilisation s'est fissuré et apparait dessous le prédateur humain, sans méchanceté mais sans pitié.

  Beyrouth, c'est la mort qui a pris possession de la terre, c' est l'enfer surgi des profondeurs, c'est l'humanité condamné à souffrir , à s'entretuer sans cesse dans une ambiance de fin du monde au milieu de ruines. Des factions ennemies se battent pour une rue, un immeuble, un terrain vague. Les odeurs de mort, de cordite, d'incendies alourdissent encore plus l'atmosphère.
  Et parfois, l'absurde s'immisce dans le conflit : un taxi dépose 3 gaillards lourdement armés sur la ligne de front et repart aussi sec faire une autre course, un commerçant ouvre son échoppe et fume une cigarette en attendant un hypothétique chaland alors que l'aboiement grave d'une arme lourde montée sur un pick-up Toyota se fait entendre à quelques rues de là, un père et ses gamins poussent une brouette remplie de jerrycans d'essence, une ambulance passe en hurlant.

  Les milices sont des clans, des familles, des obédiences qui se partagent des zones d'influence dans ce grand capharnaum. Mais le plus étrange, c'est qu'au milieu de cette guerre vit encore toute une population qui s'agrippe à la vie, partagée entre désespoir, fanatisme et fatalisme.

  FMSB. Force Multinationale de Sécurité à Beyrouth. C'est la réponse des Nations-Unies à la demande libanaise pour maintenir un semblant d'humanité, pour garantir un minimum d'espoir à cette ville-martyr. Depuis un an, cette force militaire est déployée, les Marines américains ont leur QG près de l'aéroport, les forces françaises ont installés des postes aux principaux points stratégiques de la ville.

  Mais alors que la situation semblait se stabiliser, la mission de paix change de tonalité. la stade de l'interposition est dépassé. La France organise la livraison de matériel militaire aux forces armées libanaises et le département d'état américain autorise ses troupes à riposter à toute agresssion et à solliciter l'artillerie et l'aviation au profit de l'armée libanaise.
Contre son gré, la FMSB est entrainée dans la guerre libanaise. Depuis trois mois, les postes francais sont la cible de tirs d'artillerie et subissent des pertes humaines, 16 en tout. Les canons de l'US Navy ripostent contre les artilleurs druzes et syriens qui nous visent. Les super étendard de l'armée de l'air française décollent pour anéantir une batterie syrienne au-desus de Beyrouth.
  Les renseignements sur des risques d'attaque contre des postes francais deviennent de plus en plus précis et proches. La situation se tend, les civils n'osent plus nous parler, nous approcher, nous sommes devenus des cibles. Des véhicules suspects sont signalés et repérés.

  A ce stade, le commandement français se décide d'ouvrir un nouveau poste au sud de Beyrouth. C'est une position stratégique façe à la plaine des JHAH et un excellent observatoire à la bordure à la frontière des quartiers palestiniens.

  Tout proche à l'ouest, les quartiers maudits de Sabraa et Chatila, plus connus depuis un an suite au massacre commis par les phalanges libanaises envers des populations palestiniennes en exode. Une commission internationale évalue à 2000 le nombre de morts en deux jours.

  L'immeuble choisi comme nouveau poste était auparavant occupé par l'armée syrienne et une dépollution du site est en cours par le Génie français. Des éléments précurseurs sont aussi à pied-d'oeuvre pour préparer la logistique indispensable et la prise en charge du poste par des troupes parachutistes : la 3eme compagnie du 1er RCP basé à Pau.

  Les autres postes français ont tous des noms de code : Frégate, Aviso, Corvette, Kayak... correspondant à des types de bateaux. Pour ce poste, le commandement à choisi : ce sera le Drakkar.

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